Défaillance. Que se passait il dans la vie de Milo pour que soudain, il ne contrôle plus son pouvoir ? Ou du moins, qu'il ne soit plus en mesure de décider quel rêve visiter ? Cela faisait longtemps maintenant qu'il ne s'était pas retrouvé dans le rêve d'un inconnu mais ce rêve récurrent était il celui d'une seule personne ? Et si plusieurs personnes avaient le même rêve dans des fuseaux horaires différents au point de créer un rêve persistant, comme un monde alternatif où chacun serait architecte d'une partie de ce monde ?


Voilà quelques nuits que ce royaume accueillait son roi, Milo Slain, le Marche-Rêve.
Cela commençait toujours de la même façon, un étrange malaise s'emparait du garçon, un mal de tête terrible et lorsque ça passait, une poignée de secondes plus tard, il est là, debout, au milieu d'une étendue de sable gris noir sous un ciel de cendre illuminé par un soleil noir. Lui même se voyait en noir et blanc. Un désert où il faisait froid. Probablement le rêve persistant de ceux qui étaient au bout du rouleau. Pas de végétation, pas d'animaux et des traces de pas çà et là, qui ne menaient nulle part, ou plutôt ailleurs dans ce nulle part.

Le corps de l'adolescent se faisait lourd dans ce nulle part et chaque pas était une épreuve. Pas de son, pas de vie. Le garçon s'attendait à tout instant à croiser une immense silhouette encapuchonnée portant une faux gigantesque. Car oui, croiser la Faucheuse dans un lieu comme celui là était tout à fait possible. Et ces nuits consécutives dans un lieu de désolation comme celui là poussait Milo à remettre en question ses capacités. Avait il envie d'avoir un tel pouvoir pour échouer toutes les nuits dans un lieu délabré comme celui là ? Soudain, une image lui vint à l'esprit, l'image que sa mère avait utilisée pour exprimer le fonctionnement de la magie. Un feu de camp déclinant, cruellement en manque de bois. Milo imagina que son pouvoir devait être dans le même état. Et il avançait, oui mais pour aller où ? Sa tête se vidait de toute pensée, comme si toute activité cérébrale était aspirée par ce soleil noir pour nourrir ce néant infini. Le Marche-Rêve se sentit subitement terriblement las et au bout du rouleau à son tour. Ses jambes se dérobèrent et il se retrouva à genoux, la tête dans ses bras, des larmes silencieuses coulant sur son visage qui semblait à ce moment là terriblement jeune.
_ N'abandonne pas ! Entendit il. Une voix familière sans qu'il puisse y mettre un nom dessus, une voix chaleureuse. Il releva la tête et jeta un coup d’œil autour de lui. Il n'y avait personne mais désormais une immense tour noire se dressait à l'horizon comme un trait d'ébène reliant le sable au ciel. Elle semblait à la fois proche et immensément loin.
_ Lèves toi et marche ! Cette voix à nouveau, elle s'était faite plus forte.

Il obéit. Son visage a nouveau serein, comme renforcé par la voix qui s'adressait à lui. Il ne devait pas abandonner. Ceci était une épreuve à laquelle il devait répondre. Il devait parvenir à surpasser tout ça, il devait se préparer au pire. S'il venait à visiter le rêve d'un bout du monde, s'agenouillerait il en attendant que ça passe, laissant le rêveur dans sa détresse ?

Il reprit sa marche. Ses pas toujours lourds mais forts d'une conviction nouvelle. Cette tour pour objectif, Milo bravait ce nulle part déprimant. Au fil des pas, cette tour ne semblait pas plus proche, s'en approchait il seulement ou faisait il du sur place ?
_ Ouvres ton cœur...
Une réponse à une question qu'il n'avait pas posée, un indice peut être. Mais il obéit. Il ferma les yeux et rassemblant toute sa bonté. Il se devait d'aimer ce monde et l'accepter pour le conquérir.

Lorsqu'il rouvrit les yeux, des silhouettes fuyantes peuplait désormais ce désert de cendres. Des volutes immatérielles cherchant elles aussi leur chemin. Impossible de les toucher et aucun son pour leur parler. Mais dans ce monde sans son comment cette voix pouvait elle lui parvenir ? Face à cette question sans réponse, Milo continuait sa marche vers cette tour toujours aussi inlassablement éloignée. Mais soudain, le ciel semblait moins gris ainsi que le sol. Lui même était désormais en couleurs. Ce monde... pouvait il retrouver lui aussi ses couleurs ? En avait il seulement déjà eut ? Cette tour était peut être la réponse. Faiblement mais surement, la distance s'était un brin réduite. Il en avait pas conscience mais enfin il avait avancé. Après tout, il était le roi et ceci était son royaume...